tensions chine usa bourse

Marchés boursiers : de nouvelles tensions Chine – USA

La stabilité financière de nos bourses européennes est étroitement corrélée à la santé et aux relations des marchés financiers chinois et américains. Dans un contexte de tensions grandissantes, et tandis que les entreprises chinoises sont dans le collimateur du régulateur américain, nous avons appris récemment que cinq importants groupes chinois cotés aux États-Unis ont annoncé vouloir se retirer de Wall Street. Pas de gros remous observés pour le moment sur les marchés du monde entier, mais il est important de saisir les enjeux de cette situation et de rester vigilant.

5 entreprises chinoises se retirent de la Bourse de New York

Une loi votée en 2020 par le Congrès américain oblige toute société cotée aux États-Unis à faire certifier ses comptes par un cabinet agréé par l’organisation comptable indépendante PCAOB. En cas de non-respect, les sociétés en infraction risquent une radiation de la Bourse américaine dès 2024.

Cette loi (la HFCAA – Holding Foreign Companies Accountable Act) a été votée sous la présidence de Donald Trump et mise en place en décembre 2021 sous Joe Biden. Elle accroît les obligations de transparence des entreprises étrangères et exige notamment un accès complet aux livres de comptes.

Mais les sociétés chinoises sont connues pour ne pas se soumettre à cette procédure et certaines préfèrent prendre les devants. Pékin interdit en effet l’inspection de documents d’audit par des pays étrangers, invoquant des préoccupations de sécurité nationale.

Les premières à demander la radiation de leurs actions cotées sur le New York Stock Exchange sont, selon leurs communiqués publiés séparément, les deux mastodontes du pétrole, Sinopec et PetroChina. Le poids lourd de l’assurance China Life Insurance, le géant chinois de l’aluminium Chalco, ainsi qu’une filiale de Sinopec basée à Shanghai, les ont suivies et ont aussi annoncé des démarches similaires.

Elles justifient toutes ce choix par les frais liés au maintien des cotations aux États-Unis et la lourde charge qu’impose le respect des règles en matière d’audit. Elles ont aussi expliqué que le volume de leurs actions négociées aux États-Unis restait minime par rapport à leurs autres lieux de cotation.

Les États-Unis de plus en plus méfiants

Ces cinq groupes chinois se trouvent sur une liste de sociétés mises en demeure, par l’autorité américaine de régulation des marchés (SEC), de se conformer à ces obligations comptables. Le régulateur chinois des marchés financiers affirme, quant à lui, que ces décisions ne se basent que sur des considérations commerciales.

En janvier 2021, ce sont déjà 35 entreprises chinoises accusées de travailler avec l’armée ou les renseignements chinois qui avaient été exclues de la bourse new-yorkaise (le New York Stock Exchange). Parmi elles, on comptait de grandes sociétés des télécoms, de l’aérospatiale, de la construction navale, de la construction, de la technologie ou des semi-conducteurs.

Initiée pendant le mandat de Donald Trump, la méfiance des Américains envers les entreprises chinoises ne faiblit pas sous l’administration Biden. Les sociétés originaires de l’Empire de milieu sont accusées, par les États-Unis, de ne pas être totalement indépendantes du parti communiste chinois et de menacer la sécurité des occidentaux.

Le Congrès américain est d’ailleurs en train de préparer une loi pour imposer aux entreprises qu’elles se conforment à la loi HFCAA dès 2023, et non 2024 comme prévu initialement.

Des géants chinois tels que le fournisseur de services numériques Tencent et l’Amazon chinois Alibaba sont d’ailleurs menacés d’exclusion de la bourse new-yorkaise. Seulement un souci se pose pour ses géants déjà bien implantés aux États-Unis. Leurs actions ont déjà été sélectionnées par de nombreux investisseurs et fonds de placements américains et exclure ces sociétés créerait une période de fort tumulte dans le portefeuille des épargnants américains.

Retour à la maison pour les sociétés chinoises

Les entreprises de l’Empire du milieu ont longtemps été exhortées à trouver des financements via des entrées en Bourse aux États-Unis. En 2014, le géant chinois de l’e-commerce Alibaba avait ainsi levé 25 milliards de dollars à la bourse new-yorkaise, ce qui reste encore aujourd’hui la plus grosse introduction en Bourse de tous les temps.

Mais dans un contexte de tensions diplomatiques et économiques croissantes avec les États-Unis, en particulier dans le domaine de la tech, la Chine incite désormais ses entreprises à chercher des financements sur ses propres places boursières (Hong Kong, Pékin, Shanghai ou encore Shenzhen). Assujettis à une surveillance et des obligations plus strictes aux États-Unis, de nombreuses entreprises chinoises optent au moins pour une deuxième cotation en Bourse dans leur pays d’origine. C’est le cas notamment de Baidu ou d’Alibaba.

Au contraire de la majorité de ses compatriotes, Didi avait tout de même maintenu en juin 2021 une levée de fonds aux États-Unis. Ce champion chinois de la réservation de VTC avait alors levé plus de 4 milliards de dollars. Seulement, la démarche a suscité le mécontentement de Pékin qui a craint un transfert de données sensibles au pays de l’Oncle Sam. Les autorités chinoises ont alors lancé une enquête administrative contre Didi, qui a finalement écopé d’une amende de 1,2 milliard de dollars.

La société a subi la brutale reprise en main par Pékin du secteur de la tech, débutée en 2020, après une période de tolérance en matière de données.